mardi 9 février 2016

Mia Madre, ou comment accepter la perte d'un être cher

Mia Madre est un film du réalisateur italien Giovanni Moretti, auteur de la Chambre du fils et d'Habemus Papam. Il retrace un moment de la vie d'une femme, Margharita. Margharita est une metteur en scène, en pleine remise en question à cause de la crise de quarantaine: elle est en crise, que ce soit sur le plan familial ou sur le plan professionnel.
Margharita doit faire face à la maladie de sa mère et refuse, au début en tout cas, le fait que cette dernière risque de mourir. On sent beaucoup d'affection entre elle et sa mère, mais également une tension, des non-dits ou des actes passés qui ont fragilisé le dialogue entre elles.Le dialogue en deviendrait presque formel, parfois placide et froid: elles ne savent pas comment se parler.
   On peut observer d'autre part  que Margharita ne semble pas à l'aise dans les interactions sociales, elle ne parle presque pas avec son frère et sa fille: elle est dans une sorte de rivalité  avec son frère au début du film, mais la maladie de leur mère va les rapprocher. Sa fille Olivia entretient une relation privilégiée avec la mère de Margharita, que celle-ci n'arrive pas à avoir ni avec sa fille, ni avec sa mère, ce qui semble la  contrarier, voire la rendre un peu jalouse et envieuse. Olivia fait du latin comme sa grand mère, ce qui crée un lien fort entre elles, alors que Margharita ne semble pas bien connaitre sa fille et être peinée par cette situation.
Sinon,elle ne parle avec les autres que pour les diriger, elle est très autoritaire et exigeante, que ce soit avec elle-même ou les personnes proches d'elle. Elle ordonne à ses acteurs de ne pas être le personnage, ce qui représente en fait sa conduite de tous les jours: elle s'efface, ne s'implique pas entièrement dans ce qu'elle fait: peur de souffrir ou de perdre le contrôle ?

Nanni Moretti intègre dans son film la technique de la mise en abîme: Barry, acteur qui joue un patron américain capitaliste en conflit avec ses ouvriers, n'est-ce pas une mise en abîme de Margharita ? Il y ajoute une part d'onirisme, avec la présence de plusieurs réalités dans le film, laissant planer le doute sur certaines scènes du film. Par exemple, une des scènes les plus "floues", c'est à dire où l'on ne sait pas si c'est un rêve ou la réalité, est celle de l'inondation de l'appartement de Margharita: est-ce une inondation symbolique qui montre que Margharita est dépassée, "noyée" par les évènements ? Ou est-ce une vraie inondation ?
La façon de filmer de Nanni Moretti , très sobre et simple, pudique par rapport à la souffrance et l'agonie de la mère que l'on ne voit pas souffrir ou très peu, donnent tout son charme au film, qui aurait pu être très vite dramatique, vue la thématique de celui-ci. La présence de Barry ajoute d'ailleurs une touche de légèreté, d'humour, voire de burlesque avec ses multiples ratages, qui font du bien et permettent au film de ne pas être oppressant.
Mia Madre est donc un très beau film, très mature sur la question de l'acceptation et des changements liés à la mort, à la perte d'un être cher. Un film à voir, un petit bijou signé Nanni Moretti.

                         Critique d'Emilie Loisel, classe de 1ère L2

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