mercredi 10 février 2016



Mia Madre est un film dramatique italien réalisé par Nanni Moretti et a figuré dans la sélection officielle au Festival de Cannes 2015, en compétition pour la Palme d'or.
Ce long métrage tourne autour Margharita, qui réalise un film en parallèle avec la maladie de sa mère. Son frère, Giovanni, s'occupe irréprochablement de leur mère, ce qui la mène à une forme de rivalité avec lui: il quitte son travail pour être auprès de leur mère, tandis que Margharita est toujours en plein tournage. Et pourtant rien ne se passe comme prévu. Sera-t-elle à la hauteur de son film et de sa vie personnelle ?

Séparés par des ellipses, on retrouve deux éléments récurrents, sa vie et son film, qui ont des conséquences l'un sur l'autre et nous plongent en plein coeur de l'envers du décor du cinéma, tout en racontant les disputes et les drames de sa vie privée. Le film est à cheval entre le réel et l'imaginaire, car il est parsemé de visions dont on ne sait pas toujours si elles sont réelles ou oniriques.Par exemple, le moment où la mère de Margharita sort de l'hôpital seule et désorientée et se dirige vers la roure n'est en fait qu'une vision .

Le frère de Margha rita est interprété par Nanni Moretti lui-même, qui a l'habitude de jouer dans ses propres films. Dans cette histoire, il se nomme par son véritable prénom, Giovanni, mais le personnage censé le représenter n'est pas Giovanni mais son alter-ego, Margharita. Celle-ci ,ne cesse de dire à ses acteurs "sois à côté du personnage"tout au long de l'élaboration de son film. Cette phrase a été renduecéléèbre par Moretti, qui la répétait inslassablement à ses comédiens tout en avouant, comme Margharita, qu'il n'en saisissait pas vraiment la signification.Nanni Moretti filme tout cela avec pudeur et retenue, sans brutalité. Il ne cherche en aucun cas à être démonstratif et artistique, mais s'appuie sur la force des dialogues qui débordent de sentiments.

Dans ce film on retrouve le procédé de mise en abîme: on peut se référer au film "Otto e mezzo"du célèbre réalisateur Federico Fellini, qui est cité dans le film.On peut aussi dire qu'il s'agit en réalité d'une autobiographie de Moretti car il a perdu sa mère lors du tournage de son film Habemus Papam.C'est peut-être pour cela que Moretti incarne le rôle du frère modeste et présent pour sa mère.On retrouve aussi beaucoup de similitude avec sa vie personnelle: dans son film, la mère de Margharita est professeur de latin, celle de Moretti l'était aussi! De plus Margharita tourne un film social sur l'exploitation des patrons envers les ouvriers ; or n'est-ce pas ce que la réalisatrice fait subir à ses acteurs ?Là encore Moretti se vise lui-même. On assiste à une remise en question du cinéaste italien et de son cinéma politique.
Dans ce film, Moretti essaierait-il de faire son deuil à travers le cinéma ? Après La chambre du fils, et Mia Madre, aurons nous droit à un nouveau membre de sa famille ?

Critique écrite par Léa Louis-dit-Toutain ( 1L2 ) et Mélody Trains ( 1ère ES2 )

mardi 9 février 2016

Mia Madre, ou comment accepter la perte d'un être cher

Mia Madre est un film du réalisateur italien Giovanni Moretti, auteur de la Chambre du fils et d'Habemus Papam. Il retrace un moment de la vie d'une femme, Margharita. Margharita est une metteur en scène, en pleine remise en question à cause de la crise de quarantaine: elle est en crise, que ce soit sur le plan familial ou sur le plan professionnel.
Margharita doit faire face à la maladie de sa mère et refuse, au début en tout cas, le fait que cette dernière risque de mourir. On sent beaucoup d'affection entre elle et sa mère, mais également une tension, des non-dits ou des actes passés qui ont fragilisé le dialogue entre elles.Le dialogue en deviendrait presque formel, parfois placide et froid: elles ne savent pas comment se parler.
   On peut observer d'autre part  que Margharita ne semble pas à l'aise dans les interactions sociales, elle ne parle presque pas avec son frère et sa fille: elle est dans une sorte de rivalité  avec son frère au début du film, mais la maladie de leur mère va les rapprocher. Sa fille Olivia entretient une relation privilégiée avec la mère de Margharita, que celle-ci n'arrive pas à avoir ni avec sa fille, ni avec sa mère, ce qui semble la  contrarier, voire la rendre un peu jalouse et envieuse. Olivia fait du latin comme sa grand mère, ce qui crée un lien fort entre elles, alors que Margharita ne semble pas bien connaitre sa fille et être peinée par cette situation.
Sinon,elle ne parle avec les autres que pour les diriger, elle est très autoritaire et exigeante, que ce soit avec elle-même ou les personnes proches d'elle. Elle ordonne à ses acteurs de ne pas être le personnage, ce qui représente en fait sa conduite de tous les jours: elle s'efface, ne s'implique pas entièrement dans ce qu'elle fait: peur de souffrir ou de perdre le contrôle ?

Nanni Moretti intègre dans son film la technique de la mise en abîme: Barry, acteur qui joue un patron américain capitaliste en conflit avec ses ouvriers, n'est-ce pas une mise en abîme de Margharita ? Il y ajoute une part d'onirisme, avec la présence de plusieurs réalités dans le film, laissant planer le doute sur certaines scènes du film. Par exemple, une des scènes les plus "floues", c'est à dire où l'on ne sait pas si c'est un rêve ou la réalité, est celle de l'inondation de l'appartement de Margharita: est-ce une inondation symbolique qui montre que Margharita est dépassée, "noyée" par les évènements ? Ou est-ce une vraie inondation ?
La façon de filmer de Nanni Moretti , très sobre et simple, pudique par rapport à la souffrance et l'agonie de la mère que l'on ne voit pas souffrir ou très peu, donnent tout son charme au film, qui aurait pu être très vite dramatique, vue la thématique de celui-ci. La présence de Barry ajoute d'ailleurs une touche de légèreté, d'humour, voire de burlesque avec ses multiples ratages, qui font du bien et permettent au film de ne pas être oppressant.
Mia Madre est donc un très beau film, très mature sur la question de l'acceptation et des changements liés à la mort, à la perte d'un être cher. Un film à voir, un petit bijou signé Nanni Moretti.

                         Critique d'Emilie Loisel, classe de 1ère L2